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Créer des situations gagnant-gagnant

3' de lecture - publié le 31 mai 2023

Généralement, en construisant la ville, les promoteurs cherchent à obtenir le meilleur retour sur investissement, les autorités publiques cherchent à satisfaire les réglementations et les besoins de la population de la meilleure façon possible, et les citoyens recherchent un environnement confortable et sûr pour vivre, travailler et étudier. Comment concilier ces besoins parfois contradictoires ? Ci-dessous, nous explorerons comment parvenir à des situations gagnant-gagnant, nécessitant souvent des niveaux d'effort variables de la part de chaque acteur, mais conduisant à des projets qui satisfont tout le monde.

Négocier le permis de construire, dans l’intérêt de tous

Lors de la délivrance du permis de construire, les pouvoirs publics sont tenus de vérifier sa conformité aux divers règlements d’urbanisme. Or dans certains cas, lesdits règlements ont été rédigés il y a de nombreuses années et posent des limites inadaptées au contexte de telle ou telle parcelle. Ces limites viennent alors entraver le développement du meilleur projet pour le terrain. Dans ce cas, le promoteur a intérêt à proposer un excellent projet même s’il déroge au règlement sur certains points. En présentant ce projet aux pouvoirs publics il ouvre la discussion sur des assouplissements des règles. Ces derniers ont alors la responsabilité de créer les circonstances permettant d’adapter les règles.

C’est ce qui a été fait par la municipalité d’Oudenaarde en Belgique. Dans une zone artisanale proche du centre-ville, la valorisation d’une parcelle a été possible en construisant des logements au-dessus d’une halle de stockage de bois. Cet usage étant cohérent avec le tissu urbain, la municipalité a accepté le projet présenté par l’architecte et le futur propriétaire.

Autre exemple à Bordeaux où, dans le cadre d’une loi nationale sur l’innovation, la municipalité a identifié une zone dans laquelle elle est prête à délivrer des permis de construire à affectation flexible. Les conditions sont alors réunies pour produire des projets à affectation changeante au fil des années, ce qui est tout à fait en phase avec la nécessité de refaire la ville sur la ville.

Enfin à New York, un bureau d’architectes propose une nouvelle régulation pour améliorer la qualité de l’espace public. Ce projet s’appelle Beyond the Street et, s’il est purement théorique, il propose une posture à adopter dans le cadre de négociations réglementaires. Dans le cas de New York, l’idée est que la municipalité accorde davantage de hauteur contre la récupération de surface au sol pour l’espace public. Dans le cas de villes européennes, ont peut imaginer réduire les distances aux limites en échange d’espace public par exemple.

La gestion de l’attente peut limiter les risques de blocage

Entre l’achat de la parcelle et le démarrage du chantier, les diverses procédures administratives à suivre peuvent durer des années. Cette période d’entre deux coûte de l’argent au propriétaire, et voit parfois la dégradation du site. Dans le cadre de cette gestion de l’attente, des actions d’urbanisme transitoires peuvent être mises en place dans le but d’assurer l’acceptabilité du projet et de réduire le risque de recours.

Une action d’urbanisme transitoire consiste à installer un programme à temporalité limitée sur un site en attente de projet. Contrairement à l’urbanisme temporaire qui est totalement éphémère et souvent militant, l’urbanisme transitoire s’inscrit dans le développement du projet final en permettant de tester des usages voués à être pérennisés. Par exemple, si des locaux commerciaux sont prévus dans le développement final, on peut installer des locaux temporaires loués à moindre coût aux commerçants.

 

L'urbanisme transitoire permet d’occuper le terrain en attendant les travaux, de préserver son image en évitant l’enfrichement, et d’aider les commerçants à lancer leur activité dans un nouveau site. De plus, les usagers comprennent mieux ce que le site deviendra à terme, limitant ainsi les recours sur le projet.

 

Il est toutefois possible que des usages différents de ceux prévus se développent sur le site dans la phase transitoire et plaisent énormément aux usagers. Dans ce cas, deux approches sont possibles: 1. profiter de ce retour d’expérience du terrain pour intégrer les nouveaux usages au projet final ou 2. ne pas intégrer ces usages au projet final et y mettre fin lorsque la période d’occupation temporaire arrive à son terme. La première approche a le mérite d’écouter les retours du terrain mais demande de l’agilité au maître d’ouvrage dans le développement du projet. La seconde approche permet de préserver le projet initial, mais peut engendrer une frustration à la fin de l’usage transitoire.

 

Dans tous les cas, les conventions signées avec les occupants doivent être très claires sur les modalités de fin de la mise à disposition du site, et la communication auprès du public doit être clairement lisible.

L’amélioration du cadre de vie profite à tout le monde

L’amélioration du cadre de vie, notamment en ce qui concerne l’espace public, est bénéfique pour les citoyens, les pouvoirs publics, les propriétaires et les promoteurs.

 

Avec un projet politique comme celui des Superblocks à Barcelone, la valeur des biens situés dans les quartiers concernés a augmenté. En effet, dans un Superblock, seules les voitures des résidents sont autorisées à circuler, à vitesse réduite. L’espace public devient alors plus accueillant, la pollution sonore, visuelle ainsi que celle de l’air est nettement réduite, et le quartier devient attrayant pour ses habitants comme pour les visiteurs en quête de flânerie.

Autre exemple à Berlin, où il a été décidé de fermer l’un des deux aéroports. Depuis 2021, le site de l’ancien aéroport de Tegel a démarré sa transformation. A terme, c’est tout un quartier mixte qui verra le jour. Les promoteurs immobiliers sont mis à contribution pour la construction de ce nouveau morceau de ville. Avec ce projet, la ville prend les devants et préserve ce site d’un abandon certain. Elle avance également en matière de réduction de la pollution et offre à ses habitants un nouveau lieu de vie.

Dans certains cas, l’un a plus à gagner que l’autre...

Au jeu des intérêts du promoteur, du propriétaire et des pouvoirs publics, tout le monde ne gagne pas toujours la même chose. Dans le cas de la ville d’Almere (Pays Bas) par exemple, la municipalité a tout bonnement exclu les promoteurs du développement du quartier d’Oosterwold. En effet, les particuliers sont encouragés à acheter une parcelle et y développer ce que bon leur semble en respectant seulement certaines règles d’utilisation du sol. Un manager public supervise les projets. En contrepartie de cette grande liberté et de la réduction des coûts d’accès à la propriété, les particuliers sont tenus de participer à la construction de l’espace public.

Dans le cas de la construction de maisons en urgence à Constitucion suite à un séisme et un tsunami, le bureau d’architectes mandaté a proposé de construire des demi-maisons. Cela a eu le mérite de permettre de reloger rapidement les familles tout en respectant leur budget puisque les propriétaires construiront les pièces supplémentaires dans le futur, lorsqu’ils auront le temps et/ou l’argent. En revanche, la ville se retrouve avec un quartier entier fait de demies maisons, à elle de savoir bien encadrer les futures extensions.

Enfin à Denver, le bureau d’architecture Productora a construit un complexe de plusieurs logements sur une parcelle ordinairement prévue pour accueillir deux maisons mitoyennes. Huit logements ont pu être construits sur cette parcelle dans un volume d’un seul tenant, en mutualisant certains espaces de vie. Ce projet a été autorisé par la ville de Denver dans un quartier où la demande en logements plus petits était élevée. Il n’est cependant pas impossible qu’un tel projet voie le jour dans une commune où il n’est pas forcément désiré, si le règlement d’urbanisme ne l’interdit pas.

Des situations gagnant-gagnant peuvent donc être recherchées pendant la phase de permis de construire, la période d'attente ainsi que la construction finale.

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